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29 octobre 2018

Par Liza Yelle

Conseillère juridique volontaire

 

Le vendredi 26 octobre dans l’avant-midi la docteure Dunia Marisol Hernandez Vigil est venue témoigner afin de présenter son rapport de levée de corps. Elle est le premier médecin à avoir constaté le décès, procédé à l’identification de la victime et fait un bref état des lieux. Les photos de la scène qu’avait prises la docteure ont été projetées dans la salle afin de les présenter au tribunal. L’ambiance était très lourde. Il régnait un silence respectueux dans le tribunal alors qu’on voyait des photos du corps de la défenseure des droits humains, Berta Cáceres, étendue dans sa chambre. Il était difficile de rester insensible face à ces images desquelles émanaient tant de violence. Les membres de la famille ne se présentent plus aux audiences depuis l’exclusion de leurs représentants légaux du processus judiciaire et c’était probablement pour le mieux cette journée-là.

 

Un témoin protégé vient témoigner

 

En après-midi, ce fut le tour du témoin protégé 278-2016. Le témoin a été amené dans la salle dans une boite de bois sur roulette avec vitres teintées sur les côtés. La porte de la boîte a été ouverte devant les juges afin que seulement ces derniers puissent voir le visage du témoin. Le témoignage a été fait grâce à un micro qui a un effet de distorsions de la voix, mais malgré ces mesures de sécurité on remarquait que le témoin était extrêmement nerveux et appeuré. D’ailleurs ce dernier devait témoigner plus tôt dans la journée, mais l’heure a dû être changée car le témoin avait commencé à se sentir extrêmement mal.

 

Le témoin est une connaissance d’un des accusés, Elvin Rápalo Orellana, et il est venu témoigner que celui-ci lui a confessé avoir tué Berta Cáceres. L’accusé lui avait raconté, quelques jours après les faits, comment s’est déroulé le crime et a mentionné qu’il avait reçu un paiement par la suite. Le témoin était terrorisé à l’idée d’avoir reçu ces aveux, d’autant plus que certaines personnes dans la communauté lui ont par la suite confirmé que l’accusé en question était prétendûment un tueur à gages. Le témoin a décrit physiquement l’accusé et l’a par la suite identifié dans la salle alors qu’on a fait tourner la boîte de bois.

 

Le tribunal a été très soucieux de la protection du témoin et lui a notamment suggéré de ne pas répondre à toute question qui pourrait permettre son identification. De plus, le tribunal n’a pas hésité à intervenir lorsqu’une question pouvait mettre le témoin en danger.

 

À la fin de l’audience, le tribunal a présenté un horaire très condensé de la semaine à venir qui prévoit que la dernière journée du procès sera le samedi 3 novembre. Le ministère public s’est adressé au tribunal et a dit comprendre que le délai d’expiration de la détention préventive de certains accusés venait très prochainement, mais que le temps prévu par le tribunal pour présenter la preuve n’est pas suffisant. De plus, le ministère public a informé les juges que trois de leurs témoins sont introuvables pour le moment et qu’un fonctionnaire qui devait venir présenter une des preuves documentaires a résilié son emploi depuis. Le tribunal a alors ordonné que les trois témoins manquants soient cités à comparaître par le biais d’une publication en début de semaine. Il y aurait donc à ce jour cinq témoins manquants pour la preuve du ministère public, si l’on inclut la victime de tentative d’assassinat.

 

La prochaine audience devrait avoir lieu le lundi 29 octobre à 13h30.

 

Sur l’auteure 

 

Liza Yelle est conseillère juridique volontaire d’Avocats sans frontières Canada (ASFC) dans le cadre du projet « Justice, gouvernance et lutte contre l’impunité au Honduras ». Liza participe actuellement à l’observation du procès de Berta Cáceres en coalition avec différentes organisations nationales et internationales de droits humains. Le projet est réalisé avec l’appui du gouvernement du Canada, accordé par l’entremise d’Affaires mondiales Canada.