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Le 8 mars 2017, un incendie à coûté la vie à 41 jeunes filles dans le centre de protection de la jeunesse Hogar Seguro Virgen de la Asunción. À la suite du drame, une enquête a été ouverte et plusieurs fonctionnaires et membres des forces de police ont été arrêtés. Voici un panorama des avancées dans ce dossier.
Les premières arrestations
Rapidement après le drame, le ministère public a procédé à l´arrestation de trois hauts fonctionnaires publics qui ont été accusés de maltraitance sur mineur, d’homicide involontaire, d’abus d´autorité, de manquement au devoir public et d’inflictions de lésions corporelles. Il s’agit de:
On leur reproche principalement de ne pas être intervenus pour prévenir la catastrophe et d'avoir par leur négligence entraîné la mort de 41 jeunes filles. Ils sont actuellement en détention provisoire et attendent leur procès. Celui-ci devait s'ouvrir le 9 août 2018, mais la date a été repoussée il y a peu au motif que l'organisme judiciaire est surchargé de travail. Leur procès se tiendra finalement au mois de février 2019.
Le deuxième groupe d´accusés
À la suite des premières arrestations, l´enquête menée par le ministère public a continué et c'est ainsi que dans les mois qui ont suivi, cinq autres fonctionnaires et membres des forces de police ont été arrêtés et des accusations ont été portées :
Début juin, lors des audiences de l'étape intermédiaire de ce groupe, une demande de récusation a été présentée contre le juge au dossier. Celle-ci a été rejetée en août mais entraîne des délais supplémentaires pour l'avancement du dossier puisque toutes les audiences ont été suspendues pendant l'étude de cette demande et doivent à présent être reprogrammées.
De nouvelles inculpations
Quatre nouveaux accusés devraient comparaitre durant l'été 2018. S'il existe des preuves suffisantes contre ces derniers, il est possible qu'un troisième groupe soit amené à procès dans ce dossier. Il s'agit de :
La plainte pour torture
Depuis le début de l'enquête, l’organisation de défense des droits des femmes Mujeres Transformando el Mundo, partie civile au dossier, dénonce la torture et les mauvais traitements dont ont été victimes les adolescent.es institutionnalisé.es dans ce centre. Devant le refus du ministère public de porter des accusations allant dans ce sens, Mujeres Transformando el Mundo a déposé une plainte de torture contre les huit accusés au mois d´août 2017 afin qu'une investigation impartiale soit menée. Cette plainte plus large que les présentes accusations ne porte pas uniquement sur les faits survenus les 7 et 8 mars 2017. En effet, en plus de ces événements tragiques, elle fait également état des traitements cruels et dégradants subis par les adolescent.es dans les années qui ont précédé l'incendie.
Ainsi, elle fait état des nombreux abus contre l'intégrité physique et sexuelle des adolescent.es lors de leur institutionnalisation dans ce centre de protection. Elle décrit également la longue détention des adolescent.es aux mains des forces de police la nuit du 7 mars, la force excessive exercée par ces dernières, les conditions épouvantables d'enfermement dans la minuscule salle de classe et les minutes d'agonie qui ont suivi le déclenchement de l'incendie.
Pour le moment, malgré les réticences du ministère public à reconnaître qu'un crime d'État ait pu être commis, celui-ci n'a pas rejeté la plainte et une enquête préliminaire a été entamée. Deux organisations de la société civile, le Centro para la acción legal en derechos humanos (CALDH) et la Alianza, se sont également jointes à Mujeres Transformando el Mundo dans cette quête de justice.
Dans l'opinion publique, des voix s'élèvent dans le même sens, ainsi une journaliste du journal d'investigation Nomada a publié le 8 mars dernier un récit des traitements cruels subis par les adolescent.es au sein de l'Hogar Seguro. Malgré la lenteur du ministère public à investiguer cette plainte, on ne peut qu'espérer que l'enquête aboutira et permettra de faire la lumière sur ces évènements.
Un dossier emblématique
Ce drame met en lumière les conditions de vie effroyables que sont celles des enfants et des adolescents institutionnalisés au Guatemala et la défaillance du système de protection de la jeunesse. Le dossier Hogar Seguro Virgen de la Asunción n'est pas un cas isolé, il révèle la négligence systématique, les mauvais traitements et les mauvaises pratiques des institutions étatiques en charge de protéger la jeunesse et les terribles conséquences que cela engendre.
Une condamnation dans un tel dossier lancerait donc un message fort à tous les fonctionnaires publics qui ont, de par leur mandat, la responsabilité de protéger ces enfants et adolescents et de respecter la législation nationale, mais également internationale, en matière de droit de l'enfance. Cela établirait un précédent qui devrait avoir pour effet de changer les comportements à l'égard des plus vulnérables. L'État se verrait obligé de réparer le tort qui a été causé et de prendre certaines mesures comme garantie de non répétition. On peut ainsi espérer que l'État guatémaltèque, qui n'a jusqu'à maintenant entrepris aucune révision ni réforme du modèle de protection de la jeunesse, amorcera une telle réforme qui permettra de prévenir efficacement les abus et la maltraitance.
On peut même rêver un peu plus grand et espérer que ce dossier permettra de revoir, de manière plus large, les pratiques dans l'ensemble des institutions étatiques qui ont pour mission de protéger le public et de le soigner (par exemple les centres d'accueil pour personnes souffrant de maladies mentales) afin que la dignité des populations les plus vulnérables soit toujours protégée et respectée.
[1] Articles 82 et 96, Ley de amparo, exhibición personal y de constitucionalidad
[2] Est coupable de prévarication le fonctionnaire qui, étant chargé de l´exécution d´un acte judiciaire, volontairement, présente un faux rapport relativement à cet acte (voir art. 128(b) c. cr et art. 322 du code pénal guatémaltèque)